« Ça y est, je suis dans la place et personne ne pourra m’en déloger. J’ai commencé mon œuvre et j’irai jusqu’au bout. Tel un acteur, je déboule sur scène. Mon numéro est au point. C’est toujours le même rôle et pourtant c’est chaque fois différent. Une nouvelle création mais le même plaisir. Je suis à la fois l’auteur, le metteur en scène et le comédien. Je suis le maître du jeu. Je lui donne la réplique et je lui souffle son texte.
Elle : D’où viens-tu à cette heure ? Et ne me raconte pas d’histoire, je sais quand tu mens.
Il hausse les épaules, dit qu’elle se fait des idées. Qu’il ne ment pas. Qu’il avait du boulot en retard. Que si elle continue ses jérémiades il n’aura même plus envie de rentrer. Qu’elle le fatigue et que, tiens ! Il va de ce pas se coucher. Il se dirige vers l’escalier Mais il n’aura pas le dernier mot, elle ne lâchera pas aussi facilement. Je suis là pour l’aider.
Elle : C’est trop facile, tu refuses le dialogue, comme à chaque fois ! Tu ne t’en tireras pas comme ça, il faut qu’on discute !
« Tu veux discuter ? Discutons. Mais je t’assure qu’il n’y a rien à dire… » J’admire son sang froid. Il est fort, l’animal, mais nous sommes deux et nos arguments sont inépuisables.
Elle : Ça fait presque deux semaines que tu rentres tard tous les soirs. Tu ne me feras pas croire que c’est pour le travail ! Tu as une maitresse ! Avoue donc au lieu de me regarder sans rien dire !
Sa voix est montée dans les aigus, un sanglot s’est échappé… Bien joué ma belle ! Et maintenant, on va sortir La grande scène du Trois ! Je sais mon texte sur le bout des doigts et je le lui susurre à l’oreille…
Elle : Je ne supporterai pas que tu m’humilies de la sorte. Je ne suis pas de ces femmes soumises qui acceptent de se laisser bafouer par un macho qui perd la tête à la vue du premier jupon qui passe ! Si tu ne mets pas fin à cette liaison, je te quitte ! Je travaille moi aussi, j’ai assez d’argent pour vivre !
Il la fixe sans dire un mot, soupire et lui tend son classeur ! Je savais bien qu’il n’aurait aucun argument valable ! Il dit : c’est le dossier sur lequel je bosse en ce moment. « La réintroduction des dauphins dans leur habitat naturel ». S’il compte l’amadouer ! Mais voilà qu’elle lit, qu’elle semble hésiter. Eh, ma belle, ne baisse pas ta garde ! La scène n’est pas terminée, ne me prive pas de mon apothéose !
Elle : Tu me jures que c’est bien vrai ?
Ah mais non, ça ne va pas, ça ! Ce ne sont pas les paroles ! Mais qu’est-ce qu’elle fait, elle sabote la pièce ! Et l’autre gandin mielleux qui lui sourit, lui assure qu’il l’aime comme au premier jour, qu’il n’aimera jamais qu’elle… Ecoeurant ! Reprends-toi, voyons ! Ecoute ce que je te souffle !
Elle : Mais tout de même, toutes ces soirées… et puis ta secrétaire est bien jolie…
« Pas aussi jolie que toi, ma chérie ! » Voilà qu’il la prend dans ses bras et qu’elle cède, la garce ! Elle me trahit, elle ne m’écoute plus, je me sens faiblir. Elle n’a pas le droit, c’était notre duo ! Elle est convaincue par les propos de ce bellâtre, je le sens dans ma chair. Il l’a entraînée dans leur chambre, j’entends leurs soupirs. Je deviens transparent, j’ai peine à respirer. Bientôt je ne serai qu’un sentiment oublié. Ah traitresse, tu m’as volé mon heure de gloire ! Je me meurs ! »
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